Lorsque des enfants viennent au cabinet, ils pensent souvent que l’écriture a toujours existé. Mais écrire est une invention humaine ! C’est un outil fabuleux qui est né des besoinsde l’observationde l’imagination et de la transmission. En comprendre l’origine, c’est redonner du sens à l’acte d’écrire… et souvent, retrouver de la motivation, de la curiosité, et du plaisir.

Avant l’écriture : la préhistoire du langage visuel

Bien avant l’écriture, les hommes préhistoriques communiquaient par des gestes, des sons, et surtout des images.

Dans les grottes de Lascaux ou de Chauvet, on retrouve des peintures rupestres vieilles de plus de 20 000 ans : des scènes de chasse, des animaux, des symboles.
Ces images n’étaient pas seulement décoratives : elles servaient à transmettre des savoirs, à exprimer des croyances, ou à partager une mémoire collective.

Le saviez-vous ? Ces dessins sont considérés comme les ancêtres de l’écriture. Ils témoignent du besoin profond de l’humain de laisser une trace.

Les premiers systèmes d’écriture : pour compter, gérer, transmettre

L’écriture proprement dite apparaît bien plus tard, vers -3 500 av. J.-C., en Mésopotamie (actuel Irak), là où naît la première grande civilisation urbaine.

Les Sumériens inventent le cunéiforme, une écriture faite de petits clous tracés avec un calame sur des tablettes d’argile.
Elle sert d’abord à tenir des comptes de grains, de bétail, puis à raconter des récits religieux et juridiques(comme la célèbre épopée de Gilgamesh).

Presque en même temps, en Égypte, apparaissent les hiéroglyphes : une écriture sacrée, riche en symboles, utilisée sur les tombeaux, les temples, les papyrus. Elle évoluera parallèlement à des formes plus simplifiées pour les usages du quotidien (hiératique, démotique).

L’écriture chinoise : un système vivant depuis 3 000 ans

Pendant ce temps, à l’autre bout du monde, les Chinois inventent un tout autre système d’écriture.

Vers -1 200, sur des carapaces de tortue ou des os d’animaux, les devins chinois inscrivent les premiers caractères de l’écriture chinoise : ce sont les jiaguwen.
Cette écriture, fondée sur des idéogrammes, représente des idées ou des objets, et repose sur un système logographique (chaque signe a un sens propre).

C’est un système très différent de notre alphabet : pas de lettres, mais des milliers de signes à mémoriser. Et pourtant, cette écriture a survécu jusqu’à aujourd’hui, en évoluant vers les caractères modernes utilisés en Chine !

Les Mayas : l’écriture des étoiles

Sur le continent américain, les Mayas développent une forme d’écriture très avancée bien avant l’arrivée des Européens.

Ils utilisent une écriture hiéroglyphique très complexe, gravée sur pierre, céramique ou codex (des livres pliés comme des accordéons).
Leur écriture combine signes phonétiques et symboles. Elle leur sert à noter les événements historiques, les rituels, les cycles astronomiques.

Les Mayas avaient un calendrier d’une précision remarquable, grâce à leurs connaissances astronomiques, qu’ils ont consignées dans leur écriture.

La grande révolution : l’alphabet

L’un des tournants les plus importants est l’invention de l’alphabet par les Phéniciens, vers -1 200.

Contrairement aux systèmes fondés sur des milliers de symboles, les Phéniciens simplifient tout : ils créent un système où chaque signe représente un son.
Leur alphabet sera repris par les Grecs, qui y ajoutent les voyelles, puis par les Romains, qui le transformeront en alphabet latin, celui que nous utilisons encore aujourd’hui.

Exemple amusant : la lettre B vient du mot beth (maison) en phénicien, et elle ressemblait à une petite tente vue de côté !

Du geste lent à la fluidité : plumes, parchemin, et écoles.

Au fil des siècles, les supports changent :

  • On passe du papyrus égyptien au parchemin européen, puis au papier venu de Chine.
  • Les plumes d’oie, puis les porte-plumes permettent une écriture de plus en plus fluide.

Au Moyen Âge, les moines copistes passent des heures à reproduire les textes à la main dans des scriptoriums, en développant des écritures très raffinées (onciale, caroline…).

En 1450, l’invention de l’imprimerie par Gutenberg transforme le rapport à l’écrit : les livres se diffusent, l’école se généralise, et apprendre à écrire devient une priorité.

L’école et l’écriture cursive

En France, l’écriture cursive devient une norme au XIXe siècle. On apprend à bien former les lettres, à les lier entre elles, à écrire régulièrement, proprement, et lisiblement. Le cahier d’écriture devient le compagnon de route de chaque écolier.

Aujourd’hui, dans un monde d’écrans et de claviers, beaucoup d’enfants perdent le lien entre l’acte d’écrire et le plaisir de penser. Ils voient l’écriture comme une contrainte, non comme un outil puissant.

Pourquoi raconter cette histoire aux enfants ?

Parce qu’elle redonne du sens : écrire, ce n’est pas juste recopier. C’est transmettre, s’exprimer, créer, penser, comprendre le monde.
Parce qu’elle valorise leur effort : quand un enfant comprend que l’écriture est une invention géniale et universelle, il réalise qu’il participe à une aventure humaine ancienne.
Parce qu’elle éveille la curiosité : en graphothérapie, on peut s’amuser à écrire comme un scribedéchiffrer des hiéroglyphes, ou inventer son propre alphabet !

L’écriture est un super-pouvoir !

Et si on la regardait autrement ? Loin d’être une corvée, l’écriture est un héritage précieux, une traduction graphique de la pensée, un langage universel… et un super-pouvoir que chaque enfant peut s’approprier, à son rythme.

L’écriture manuscrite : c’est pas sorcier !

N’hésitez pas à me contacter ici